Proposition de modification de la loi sur la langue française (suite 2)

Proposition de modification de la loi
sur la langue française (suite 2)

à la suite du projet de Guy Dalens (août 2023) nous publions ici le projet d'Olivier Gohin, professeur émérite en droit publicSimon Jolin-Barrette, ministre de la Justice et de la Langue française du Québec, a été reçu jeudi 23 juin, à l’Académie française

Ébauche d'une proposition de loi portant promotion du français et de la francophonie et défense de la langue française

Exposé des motifs

En application de l'article 2, alinéa 1er de la Constitution "Le français est la langue de la République", inscrit dans le titre 1er sur la souveraineté, et de l'article 87 de la même loi fondamentale, inscrit dans le titre XIV relatif notamment à la francophonie "La République participe au développement de la solidarité et de la coopération entre les États et les peuples ayant le français en partage", la présente proposition de loi vise à compléter la loi n° 94-665 du 4 août 1994 pour prévoir la promotion du français en France et de la francophonie dans le monde et pour renforcer la défense de la langue français sur le territoire national. Il est tenu le plus grand compte des apports, à droit constitutionnel constant, de la décision n° 94-345 DC Emploi de la langue française du Conseil constitutionnel en date du 29 juillet 1994.

Au centre de cette proposition de loi, il y a l'Autorité de la langue française qui, comme l'ARCOM, est une nouvelle autorité publique indépendante, donc une personne morale de droit public autonome par rapport à l'État placé sous son contrôle, à laquelle sont attribuées des compétences en matière de consultation, mais aussi de sanction. Il s'agit, ici, de sortir de l'ambiance négative, car restrictive, voire agressive, dans laquelle la lutte légitime en faveur de la langue française, face à la langue anglaise principalement, s'attache trop souvent, en France. C'est pourquoi, du reste, le pouvoir de sanction est dépénalisé la méconnaissance d'une des obligations limitativement énumérées de langue française est un manquement, et non une infraction, et la sanction éventuellement prononcée, en ce cas, est administrative, et non pénale.

De plus, le droit transposé et adapté, dans l'exercice de ce pouvoir de sanction, n'est pas celui de la concurrence déloyale, sévèrement réprimé, mais, de façon raisonnable, celui de la diffamation publique, sans excès inutile et même contre-productif, comme il convient dans le champ de la communication écrite ou orale. Car, ce qui est recherché, en premier lieu, c'est de faire rectifier rapidement tout manquement, et non pas d'obtenir finalement une somme.

L'article 1er précise l'historique et le champ d'application de la disposition précitée de l'article 2 de la Constitution, en tenant compte de la décision n° 94-345 DC mentionnée.

Les articles 2 et 3 affirment le rôle de l'Académie française dans la détermination de la langue française, en France.

Les articles 4 à 10 établissent les règles d'organisation et de fonctionnement de l'Autorité de la langue française.

Les articles 11 à 13 explicitent l'activité de l'Autorité en tant que, par ses avis et recommandations, elle contribue à la promotion du français et de la francophonie, en France et dans le monde.

Les articles 14 à 22 explicitent l'activité de l'Autorité en tant que, par ses avertissements et ses sanctions, elle contribue à la défense de la langue française sur le territoire national, en tenant compte des exigences du droit constitutionnel, au titre de l'article 11 de la Déclaration de 1789.

L'article 23 précise quelles sont les obligations de langue française dont la méconnaissance sont des manquements pouvant donner lieu à avertissement, puis, en cas de récidive, à sanction.

L'article 24 prévoit l'irrecevabilité de toute demande devant une institution française, autre qu'une juridiction, qui n'est pas formulée en langue française.

L'article 25 prévoit l'irrecevabilité de toute requête devant une juridiction française qui n'est pas rédigée en langue française, sauf exception pour ne pas méconnaître les droits de tout justiciable qui, sans avocat, n'est ni de nationalité française ni de langue française.

L'article 26 ajuste la loi Toubon du 4 août 1994 en ce qui concerne l'enseignement ainsi que le droit des examens et des concours, en exceptant, d'une part, l'enseignement d'une autre langue, et, d'autre part, tous les enseignements dans le supérieur, constitutionnellement protégé dans son indépendance.

L'article 27 est relatif au remboursement partiel ou total d'une subvention publique attribuée à une personne morale de droit privé dont l'activité ne serait pas intégralement en langue française, en France, sous réserve des associations françaises dont l'objet social nécessite l'emploi d'une autre langue.

Les articles 28 et 29 font obligation aux fonctionnaires ou autres agents publics français de s'exprimer en français dans l'exercice de leurs fonctions, en France et à l'étranger, notamment dans les postes diplomatiques et les organisations internationales, à commencer au sein des institutions de l'Union européenne, sauf à s'exposer à une sanction disciplinaire.

L'article 30 reprend et modifie la proposition de loi n° 59 présentée par le sénateur Philippe Mariani, le 10 novembre 2004, et créée une délégation parlementaire à la langue française, mais aussi à la francophonie, qui ne soit pas propre à chaque assemblée, mais commune aux deux assemblées en ces deux matières dont la défense et la promotion sont consensuelles.

L'article 31 prévoit les précisions à apporter à la présente loi.

L'article 32 assure la coordination des dispositions de la loi Toubon et de la présente loi, l'application de l'une et de l'autre étant prévue sur tout le territoire national.

 

Texte de proposition de loi à déposer

Article 1er

L'article 111 de l'ordonnance du 25 août 1539 sur le fait de justice et l'article 1er du décret du 2 thermidor an II modifié sur la langue française ont et conservent force de loi.

Seule officielle de la République, le français est, en France, la langue de communication écrite ou orale au sein des personnes publiques ou entre personnes publiques ou entre une ou des personnes publiques et une ou des personnes privées.

Tout personnel ou usager d'un service public à gestion publique ou privée a droit, en France, à une communication écrite ou orale en langue française.

Article 2

Par ses décisions prises dans les conditions qu'elle établit, l'Académie française détermine la langue française, comme langue de la République, en fixant ses règles, notamment son vocabulaire, son orthographe, sa grammaire, sa syntaxe et sa ponctuation.

Article 3

Au sens de la présente loi,
a) la langue française est, sur le territoire national, celle déterminée par l'Académie française ;
b) un texte en écriture inclusive, telle que définie par l'Académie française, n'est pas en langue française ;
c) les autres langues que le français sont :

  • les langues régionales qui sont les langues vivantes, recensées par la Délégation nationale à la langue française et aux langues de France comme traditionnellement parlées sur une partie du territoire national ;
  • les autres langues vivantes qui sont étrangères ;
  • les langues anciennes qui ne sont plus parlées.

Article 4

L'Autorité de la langue française est une autorité publique indépendante. Elle contribue à la promotion du français et de la francophonie, en France et dans le monde, et à la défense de la langue française sur le territoire national.

Article 5

L'Autorité comprend neuf membres qui sont répartis en trois collèges de trois membres chacun :

1° Le premier collège comprend :

  • une personnalité qualifiée, nommée par le Président de la République, qui préside l'Autorité ;
  • une personnalité qualifiée, nommée par le président du Sénat ;
  • une personnalité qualifiée, nommée par le président de l'Assemblée nationale.

2° Le deuxième collège comprend :

  • un membre ou ancien membre du Conseil d'État, nommé par le vice-président du Conseil d'État, premier vice-président de l'Autorité ;
  • un membre ou ancien membre de la Cour de cassation, nommé par le premier président de la Cour de cassation ;
  • un membre ou ancien membre de la Cour des comptes, nommé par le premier président de la Cour des comptes.

3° Le troisième collège comprend :

  • une personnalité qualifiée, nommée par le secrétaire perpétuel de l'Académie française, second vice-président de l'Autorité ;
  • une personnalité qualifiée, nommée par le secrétaire général de l'Organisation internationale de la Francophonie ;
  • une personnalité qualifiée, nommée par le président de la Fondation des Alliances françaises.

Article 6

Les personnalités qualifiées sont de nationalité française et ne sont membres, à la date de leur nomination, ni du Parlement ni du Gouvernement ni d'une autre institution ou autorité constitutionnelle ou administrative ni d'une autorité administrative ou publique indépendante, sous réserve, le cas échéant, du renouvellement comme membre de l'Autorité.

La procédure prévue au dernier alinéa de l'article 13 de la Constitution est applicable aux nominations des personnalités qualifiées. Les nominations effectuées par le président de chaque assemblée du Parlement sont soumises au seul avis de la commission permanente compétente de l'assemblée intéressée. Les nominations prononcées par arrêté de l'autorité de nomination sont publiées au Journal officiel.

Article 7

Le mandat des membres de l'Autorité dure six ans et n'est pas renouvelable.

Toutefois,
a) pour former la première Autorité, le premier membre de chaque collège est nommé pour six ans, le deuxième pour quatre ans et le troisième pour deux ans ;
b) les membres de l'Autorité, désignés en remplacement de ceux dont les fonctions ont pris fin avant leur terme normal, achèvent le mandat de ceux qu'ils remplacent.

À l'expiration de ce mandat, ils peuvent être renouvelés comme membres de l'Autorité s'ils ont occupé ces fonctions de remplacement pendant moins de deux ans.

Article 8

Les membres de l'Autorité exercent des fonctions compatibles avec leur situation professionnelle, en activité ou à la retraite, dans le secteur public ou privé. Ils bénéficient, chaque mois, d'une rémunération liée à la durée effective de leurs fonctions au sein de l'Autorité au cours du mois précédent.

Pour les membres de l'Autorité en activité professionnelle qui sont agents de la fonction publique ou salariés du secteur privé, cette rémunération peut être convertie, en tout ou en partie, à leur choix, en décharge horaire. Hors administrations centrales ou services déconcentrés de l'État, cette décharge est financièrement compensée par l'État.

Article 9

Est mis à la disposition de l'Autorité un service administratif et financier permanent, coordonné par un secrétaire général, nommé par le président de l'Autorité et placé sous son autorité.

Les autres agents de ce service sont des fonctionnaires de l'État, recrutés par le président de l'Autorité, sur proposition de son secrétaire général, et en position de détachement à temps plein. Ils sont tenus par les obligations résultant du dernier alinéa de l'article 9 de la loi n° 2017-55 du 20 janvier 2017 portant statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes.

Les agents chargés de la constatation, comme enquêteurs, de manquements aux obligations de langue française ou de la préparation, comme rapporteurs, des délibérations de l'Autorité n'assistent pas au délibéré de ses séances.

Article 10

L'Autorité délibère à huis clos, en présence de cinq de ses membres au moins, à la majorité des membres présents.

La séance est présidée par le président de l'Autorité ou, en cas d'empêchement, par le premier vice-président ou, à défaut, du second vice-président ou encore, en son absence, par le plus âgé des membres présents de l'Autorité.

Le président de séance a voix prépondérante en cas de partage égal des voix.

Article 11

L'Autorité contribue, par ses avis ou ses recommandations à la promotion de la langue française et de la francophonie, en France et dans le monde.

À ces fins, l'Autorité peut répondre pour avis à une demande formulée par les autorités suivantes :
a) le Premier ministre ou un autre membre du Gouvernement pour les administrations centrales ou les services déconcentrés de l'État, placés sous son autorité ;
b) le président du Sénat ou le président de l'Assemblée nationale ou le co-président ou, de façon conjointe, les deux co-présidents de la délégation parlementaire à la langue française et à la francophonie ;
c) le vice-président du Conseil d'État ou le premier président de la Cour de cassation ou le Procureur général près cette Cour ou le président de toute juridiction ni administrative ni judiciaire ;
d) l'exécutif d'une collectivité territoriale ou le directeur d'un établissement public ou le dirigeant d'une personne morale de droit public ou d'une personne de droit privé, chargée d'une mission de service public, ou d'une entreprise privée à capital majoritairement public ;
e) le président d'une association déclarée dont l'objet social est, en tout ou en partie, la promotion du français et de la francophonie, en France et dans le monde.

Le demandeur est informé de la suite donnée à sa demande et, si un avis est rendu, il lui est transmis avant d'être publié.

Article 12

Aux mêmes fins de promotion du français et de la francophonie, en France et dans le monde, l'Autorité peut formuler d'office des recommandations rendues publiques.

Article 13

L'Autorité contribue, par ses avertissements ou ses sanctions, à la défense de la langue française sur le territoire national. Les actes prévus par le présent article sont motivés de même que le refus de prononcer un avertissement ou de prendre une sanction.

Article 14

À cette fin, l'Autorité peut, dans le délai de trois mois de la constatation du fait litigieux, de tout manquement, en France, par une personne morale de droit public ou une personne de droit privé, chargée d'une mission de service public à une obligation, au moins, de défense de la langue française définie à l'article 23 de la présente loi, se saisir d'office ou être saisie par les autorités ou institutions ou personnes suivantes :

a) le Premier ministre ou tout autre membre du Gouvernement dans le cadre de ses attributions ;
b) toute autre institution ou autorité constitutionnelle ou administrative indépendante ou toute autre autorité publique indépendante ou toute autorité juridictionnelle ;
c) l'Académie française ;
d) toute collectivité territoriale ou tout établissement public ;
e) tout syndicat professionnel ou toute organisation patronale ;
f) toute association agréée de défense des consommateurs, de l'article L. 811-1 du code de la consommation, ou de défense de la langue française, de l'article 2-14 du code de procédure pénale.

Toutefois, dans le cas l'obligation prévue à l'article 23 a), le saisissant peut être, aux mêmes conditions, toute personne physique ou morale à laquelle l'acte est notifié ou le document communiqué.

Article 15

Les agents mentionnés à l'article L. 511-3 ou énumérés à l'article L. 511-22 du code de la consommation sont habilités à rechercher, à leur initiative ou à la demande de l'Autorité, et à constater par procès-verbal tout fait litigieux constitutif, selon eux, d'un manquement, au moins, par une personne morale de droit public ou une personne de droit privé, chargée d'une mission de service public, à une obligation de défense de la langue française. Le procès-verbal est transmis sans délai à l'Autorité.

L'Autorité peut aussi faire procéder par ses agents à la recherche et à la constatation par rapport écrit du tout fait litigieux susceptible, selon eux, d'être un manquement de l'alinéa précédent.

Sur le base du procès-verbal ou du rapport de constatation, l'Autorité peut retenir tout manquement à une obligation de langue française à l'encontre d'une personne morale de droit public ou d'une personne de droit privé, chargée d'une mission de service public, et prononce, en ce cas, un avertissement notifié par écrit à l'autorité compétente qu'elle identifie de cette personne morale ou à cette personne physique.

L'autorité ou la personne saisissante de l'article 14 est informée du refus d'avertissement ou de l'avertissement rendu public par l'Autorité.

Article 17

En cas de première récidive, établie par tout moyen, trois mois au moins et un an au plus après l'avertissement, du ou des manquements par la même personne morale de droit public ou la même personne de droit privé, chargée d'une mission de service public, à la même obligation ou à l'une des mêmes obligations de défense de la langue française pour le même fait litigieux, l'Autorité peut engager une procédure contentieuse en vue de pouvoir prendre une sanction à l'égard de cette personne.

L'autorité ou la personne saisissante de l'article 14 est informée de l'engagement de cette procédure contentieuse et, à son terme, du refus de sanction ou de la sanction rendue publique par l'Autorité.

 

Article 18

Après exercice des droits de la défense, l'Autorité peut prononcer à l'encontre de la personne en première récidive, compte tenu de la gravité du ou des manquements reposant sur le même fait litigieux, une sanction pécuniaire dont le montant ne peut pas excéder 12 000 euros.

Toute récidive ultérieure, établie par tout moyen, trois mois au moins après la sanction antérieure et dans les trois ans au plus de la première sanction, pour le même fait litigieux, peut donner lieu à une nouvelle sanction prononcée par l'Autorité, d'un montant maximal obtenu par la multiplication du montant de 12 000 euros par le nombre de récidives ultérieures.

 

Article 19

Les sanctions pécuniaires qui sont décidées par l'Autorité sont notifiées à la personne en récidive et recouvrées par les services compétents de l'État et pour le compte de l'Autorité comme les créances de l'État étrangères à l'impôt ou au domaine.

Article 20

Les recours contre les avis, recommandations ou avertissements ainsi que contre les refus d'avertissement ou de sanction sont irrecevables.

Les sanctions pécuniaires sont administratives et peuvent faire l'objet, dans les deux mois de leur prononcé, d'un contrôle juridictionnel spécifique de plein contentieux, à effet suspensif et dispensé du ministère obligatoire d'avocat, devant le Conseil d'État qui est saisie par la personne sanctionnée, l'Autorité étant la partie en défense. Il est statué dans les trois mois du recours.

Article 21

Aucune intervention volontaire ou forcée, en demande ou en défense, n'est admise au cours de la procédure contentieuse devant l'Autorité ou, sur recours contre la sanction, devant le Conseil d'État.

Article 22

Sous réserve des secrets protégés par la loi, l'Autorité publie un rapport annuel qui consigne l'ensemble des avis, recommandations, avertissements et sanctions de l'année civile précédente ainsi que les éventuelles décisions du Conseil d'État rendues sur ces sanctions.

Ce rapport annuel peut être diffusé pat l'Autorité sur un site électronique, domicilié en France et librement accessible.

Article 23

Est une obligation de défense de la langue française :

a) la rédaction intégrale en langue française, sauf illégalité interne pour violation directe de la loi, de tout acte administratif unilatéral ou de tout autre document administratif au sens de l'article L. 300-2 du code des relations entre le public et l'administration ou de toute autre disposition législative ou réglementaire ainsi que des décisions de la Commission d'accès aux documents administratifs ou de la jurisprudence administrative ;

b) l'emploi exclusif de la langue française dans la communication écrite ou orale sur le territoire national, par tout support ou procédé, d'une personne morale de droit public ou d'une personne de droit privé, chargée d'une mission de service public.
Cette obligation vaut notamment dans les assemblées délibérantes des collectivités territoriales de la République ou de leurs groupements ou par l'usage des termes proposés par les commissions de terminologie et adoptés, après avis favorable de l'Académie française, par voie d'arrêtés de terminologie publiés au Journal officiel dès lors qu'ils indiquent les termes de langue étrangère qu'ils remplacent.Toutefois, les dispositions du présent b) ne sont pas applicables aux organismes ou aux services de communication par tout support ou procédé, notamment ceux de radiodiffusion sonore ou télévisuelle, qu'ils soient publics ou privés ;

c) l'emploi de la langue française dans les annonces aux passagers des services publics de transports en commun, en France, par les employés des personnes morales de droit public ou des personnes de droit privé qui en ont gestionnaires. Ces annonces doivent, le cas échéant, ou peuvent être suivies d'une traduction dans une ou plusieurs autres langues que le français.

d) l'emploi de la langue française dans les annonces faites au public ou les documents à lui distribués, avant ou pendant une manifestation organisée en France, soit scientifique, sous quelque dénomination que ce soit, soit sportive, de quelque niveau que ce soit, accompagnés, le cas échéant, de la traduction orale des annonces ou écrite des documents dans une ou plusieurs autres langues que le français. Toutefois, les dispositions du présent d) ne sont pas applicables aux contributions ou aux interventions, présentées à l'écrit ou à l'oral, lors d'une manifestation scientifique dont l'objet suppose l'emploi d'une ou de plusieurs autres langues que le français, comprises par les auditeurs ou les lecteurs, ou qui est organisée par ou dans un établissement d'enseignement supérieur.
Elles ne le sont pas non plus, en toute hypothèse, aux enseignants ou chercheurs français ou étrangers de l'enseignement supérieur, de quelque statut qu'ils soient ;

e) la diffusion en langue française de tout message publicitaire, à l'écrit ou à l'oral, par tout support ou procédé, sur le territoire national.
Toutefois, le français peut être utilisé avec une autre langue vivante auquel cas la traduction dans cette langue doit être donnée immédiatement et intégralement, avec, à l'écrit, des caractères de même taille, au plus ;

f) la passation en langue française d'une convention ou d'un contrat de droit public ou de droit privé, y compris pour une activité industrielle ou commerciale, auquel une personne morale de droit public ou une personne de droit privé et de nationalité française, au moins, est partie dès lors que cette convention ou ce contrat est exécuté en France, intégralement ou même partiellement.

Toutefois, dans le cas où une personne physique ou morale de droit privé, partie à une telle convention ou à un tel contrat, n'est ni de nationalité française ni de langue française, une version intégrale qui ne fait pas foi est établie dans la langue de cette personne et à ses frais, sur prescription explicite de la loi ou à sa demande, signée par elle et annexée à la convention ou au contrat ;

g) l'emploi de la langue française par une personne morale de droit public ou de droit privé, chargée d'une mission de service public, dans tous les termes d'une marque de fabrique, de commerce ou de service, sauf s'il existe, dans cette marque, un ou plusieurs termes dans une autre langue vivante, sans équivalent connu ni traduction possible en français ;

h) la rédaction en langue française des panneaux de signalisation routière ou des plaques de rue qui, toutefois, à l'exception des panneaux des routes nationales ou des autoroutes, peut être suivie de sa traduction en langue régionale, dans une graphie différente et avec des caractères de même taille au plus, pour autant qu'il n'est pas porté atteinte à la sécurité routière sur les voies communales ou les routes départementales.

Article 24

L'article L. 100-2 du code des relations entre le public et l'administration est complété par un alinéa 2 ainsi rédigé : " La langue des relations entre le public et l'administration est, à l'écrit et à l'oral, le français exclusivement ".

Est irrecevable toute demande formulée par une personne physique de nationalité française ou d'une personne morale exerçant son activité en France auprès de toute administration publique qui n'est pas formulée intégralement en langue française. Il en est de même des éventuelles pièces jointes à la demande.

Tout autre document écrit, produit par une personne physique ou morale de l'alinéa précédent auprès des institutions ou autorités ou services de l'administration publique, est rédigé intégralement en langue française, sauf à être écarté sans examen ni prise en considération.

Article 25

Les juges, les auxiliaires de justice ou les officiers ministériels doivent, dans l'exercice de leurs fonctions, s'exprimer, à l'écrit ou à l'oral, en langue française exclusivement. À peine d'irrégularité substantielle, leurs décisions ou autres actes sont rédigés intégralement en français.

Est irrecevable toute requête d'une personne physique domiciliée en France ou d'une personne morale exerçant son activité en France devant une juridiction française, soit de l'ordre administratif ou judiciaire, soit ni administrative ni judiciaire, qui n'est pas intégralement rédigée en langue française.

Il en est de même des pièces jointes à la requête et, le cas échéant, de tout autre élément écrit ou oral de la procédure, produit en demande ou en défense, dans la phase d'instruction comme de jugement.

Toutefois, il n'en est pas ainsi dès lors que le demandeur ou le défendeur est une personne physique ou morale de droit privé qui n'est ni de nationalité française ni de langue française. En ce cas, est requise, à ses frais, sauf le bénéfice de l'aide juridictionnelle à cet effet, une version intégrale en langue française qui fait foi de chaque élément écrit ou oral de la procédure qu'elle produit en demande ou en défense.

Article 26

La langue de l'enseignement, en France, est, à l'écrit et à l'oral, le français.

Il en est ainsi dans l'enseignement primaire et secondaire, en dehors des enseignements obligatoires ou facultatifs de langues autres que le français.

Il en est de même de la langue de l'enseignement et de la recherche dans les établissements publics ou privés de l'enseignement supérieur, en dehors des enseignements obligatoires ou facultatifs de langues autres que le français et sous réserve des innovations pédagogiques ou des aménagements de scolarité en faveur de leurs étudiants, en France ou à l'étranger.

Les sujets d'écrit ou d'oral de toute épreuve d'examen en vue de l'obtention d'un diplôme national ou de concours de recrutement ou de promotion dans l'une des trois fonctions publiques sont intégralement posés et traités en langue française, sauf si telle ou telle épreuve de l'examen ou du concours doit être passée, en tout ou partie, dans une langue autre que le français faisant l'objet de l'épreuve, ce dont les candidats doivent être prévenus dans le programme publié de l'examen ou du concours. En dehors de cette exception,

a) si le sujet de l'épreuve d'examen ou de concours n'est pas intégralement posé en français, l'épreuve est annulée ;

b) si le sujet de l'épreuve d'examen ou de concours n'est pas intégralement traité en français, la note zéro est attribuée à l'épreuve.

Les mémoires de master ou d'autres diplômes nationaux et les thèses de doctorat soutenus en France sont intégralement rédigés par les candidats en langue française. Toutefois, il n'en est pas ainsi lorsque le sujet du mémoire ou de la thèse suppose, selon le directeur du mémoire ou de la thèse, l'emploi, en tout ou en partie, d'une ou de plusieurs autres langues que le français, comprises par les membres du jury de soutenance.

Sauf le doctorat, dans le cas de la réserve de l'alinéa précédent, ainsi que les équivalences données, en France, à des notes obtenues à l'étranger, dans le cadre d'accords internationaux d'échanges universitaires, aucun diplôme de l'enseignement supérieur, national ou reconnu par l'État, ne peut être délivré sans que la moitié au moins des coefficients affectés aux examens, pour l'obtention de ce diplôme, corresponde à des épreuves passées, à l'écrit ou à l'oral, sur des sujets posés et traités intégralement en langue française.

 

Article 27

N'est pas attribuée une subvention sur fonds publics à une personne morale de droit privé dont l'activité à l'écrit ou à l'oral, en France, n'est pas prévue pour être réalisée intégralement en français.

S'il est établi, par procès-verbal d'agents mentionnés à l'article L. 511- 3 ou énumérés à l'article L. 511-22 du code de la consommation ou par rapport de constatation des agents de l'Autorité, que l'activité à l'écrit ou à l'oral de la personne subventionnée n'est pas ou n'est plus réalisée intégralement en français, il y a lieu à remboursement total ou partiel de la subvention attribuée, au terme d'une procédure de répétition de l'indu.

Toutefois, il n'en est pas ainsi lorsque la personne à subventionner ou subventionnée est une association déclarée dont l'objet social nécessite l'emploi d'une ou de plusieurs autres langues que le français, comprises par ses adhérents.

Article 28

Tout fonctionnaire ou autre agent public des trois fonctions publiques, de l'État, territoriale ou hospitalière, doit, dans l'exercice de ses fonctions, s'exprimer, à l'écrit ou à l'oral, en langue française exclusivement.

Cette obligation vaut aussi, dans l'exercice de leurs fonctions, pour les fonctionnaires ou autres agents publics civils et militaires de l'État dans les postes diplomatiques de la France ou dans les représentations françaises de l'Union européenne ou des autres organisations internationales dont la France est membre.

Sauf nécessité de service, la méconnaissance de l'obligation du présent article est une faute de fonction publique et expose le fonctionnaire ou autre agent public qui la commet à une sanction disciplinaire.

Article 29

Les documents transmis par les institutions ou autorités ou services de la représentation de la France aux institutions, autorités ou services d'un État étranger ou de l'Union européenne ou de toute autre organisation internationale dont la France est membre et dont le français est langue officielle ou de travail, sont rédigés intégralement en français.

Les documents transmis par les institutions ou autorités ou services de l'Union européenne ou de toute autre organisation internationale dont la France est membre et dont le français est langue officielle ou de travail, aux institutions ou autorités ou services de la représentation de la France, sans être rédigés intégralement en français, ne sont pas traités et sont retournés par eux, sans commentaire ni délai, à ces institutions, autorités ou services. Les fonctionnaires ou autres agents publics de l'État qui représentent la France doivent refuser d'en délibérer.

Sauf nécessité de service, la méconnaissance des obligations du présent article est une faute de fonction publique et expose le fonctionnaire ou autre agent public de l'État qui la commet à une sanction disciplinaire.

Article 30

Après l'article 6 decies de l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, il est inséré un Article 6 undecies ainsi rédigé :

"Article 6 undecies :

- I. Il est constitué une délégation parlementaire à la langue française et à la francophonie, commune à l'Assemblée nationale et au Sénat.
Sans préjudice des compétences des commissions permanentes ou spéciales ni de celles des commissions des affaires européennes de chaque assemblée, a pour mission
- de veiller à l'application de l'article 2, alinéa 1er et de l'article 87 de la Constitution, de la loi n° 94-665 du 4 août 1994 relative à l'emploi de la langue française et de la présente loi ;
- de suivre les politiques publiques mises en œuvre par le Gouvernement en faveur de la consolidation et du développement de la langue et de la culture françaises en France et dans le monde, notamment auprès des États et des peuples ayant le français en partage, et d'informer les assemblées de ce suivi.

II. La délégation est composée de vingt-quatre membres dont deux co-présidents, l'un député et l'autre sénateur.
Les membres de la délégation sont désignés en leur sein par chacune des deux assemblées de manière à assurer une représentation proportionnelle des groupes politiques de cette assemblée, chaque groupe politique étant représenté par un de ses membres au moins. Au-delà de douze groupes par assemblée, les douze groupes de plus fort effectif sont représentés et, en ce cas, à égalité d'effectif, le ou les groupes dont la moyenne d'âge est la plus élevée, est ou sont pris en compte dans la représentation.
Les douze députés, membres de la délégation, sont désignés par l'Assemblée nationale au début de la législature ou à la suite de toute démission en cours de législature. Ils élisent le député co-président pour la durée de la législature. Les douze sénateurs, membres de la délégation, sont désignés après chaque renouvellement partiel du Sénat ou à la suite de toute démission en cours de mandature. Ils élisent le sénateur co-président pour la durée de la mandature.

III. La délégation parlementaire à la langue française et à la francophonie peut être saisie, dans le cadre de sa mission, des projets ou propositions de loi ou d'ordonnance relatifs à la langue française ou à la francophonie par :
- le bureau de l'une ou l'autre assemblée, à son initiative ou sur demande d'un président de groupe politique de l'Assemblée nationale ou du Sénat ;
- une commission permanente ou spéciale de chaque assemblée ;
Elle peut aussi être saisie par une des deux commissions ou, de façon conjointe, par les deux commissions des affaires européennes des textes soumis aux assemblées en application de l'article 88-4 de la Constitution.

IV. Le Gouvernement communique à la délégation les documents nécessaires et les informations utiles à l'accomplissement de sa mission.

V. La délégation demande à entendre tout membre du Gouvernement.
Elle peut demander à entendre toute personnalité, quel que soit son statut, en raison de sa compétence dans les domaines de la langue française ou de la francophonie.
Les séances de la délégation se tiennent à huis clos, sauf décision contraire de ses co-présidents sur tout ou partie de la séance et pour toute personne qui en fait la demande motivée.

VI. La délégation établit, dans le cadre de sa mission, des rapports comportant des recommandations qui sont déposés sur le bureau de chaque assemblée et transmis aux commissions parlementaires compétentes ainsi qu'aux commissions des affaires européennes. Ces rapports sont rendus publics, sous réserve des secrets protégés par la loi ou sauf décision contraire de la délégation.
Elle établit en outre, chaque année, un rapport public dressant le bilan de son activité et comportant, le cas échéant, des propositions d'amélioration de la législation ou de la réglementation sur l'emploi, la défense ou la promotion de la langue française.

VII. La délégation établit son règlement intérieur qui est soumis à l'approbation du bureau des deux assemblées.

VIII. Les dépenses afférentes au fonctionnement de la délégation sont financées et exécutées comme dépenses des assemblées parlementaires dans les conditions fixées par l'article 7 ".

Article 31

Les modalités d'application des articles 4 à 29 de la présente loi sont précisées par décret en Conseil d'État.

L'Autorité complète, en tant que de besoin, par son règlement intérieur, sous le contrôle du Conseil d'État, juge de l'excès de pouvoir, les règles d'organisation, de procédure ou de fonctionnement applicables devant elle.

Les modalités d'application de l'article 30 sont précisées par les règlements de l'Assemblée nationale ou du Sénat.

Article 32

La présente loi est applicable en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna.

La loi n°94-665 du 4 août 1994, également applicable dans les collectivités territoriales d'outre-mer énumérées à l'alinéa précédent, est abrogée en celles de ses dispositions qui sont contraires à la présente loi ou incompatibles avec la présente loi. Le Conseil d'État consignera ces dispositions dans un rapport adopté en Assemblée générale, transmis à la délégation parlementaire à la langue française et à la francophonie et rendu public dans les trois mois suivant la promulgation de la présente loi.

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