Le français dans le programme des candidats

Le français dans le programme des candidats

Élection présidentielle 2017

langue française politique : A moins d'un mois de l'élection présidentielle, nous avons souhaité nous pencher sur les programmes des différents candidats afin de voir la place qu'ils accordent à la langue française, aussi bien en France que dans les institutions internationales.

Le statut du français en France même n'est, à part une exception, même pas évoqué. Oublié l’anglais langue de travail obligatoire dans de plus en plus de grandes entreprises françaises, oubliés les colloques financés par des fonds publics qui se tiennent en anglais en France sans traductions, oubliés le nombre croissant de grandes écoles ou d’universités qui proposent des modules entièrement ou partiellement en anglais, oublié l'affichage de plus en plus anglomane qui pollue nos villes en contradiction avec la loi, oubliée la colonisation linguistique imposée par les grands média,s y compris publics, (séries, films, chansons états-unienne)...

Nous pouvons regrouper les 11 candidats en 4 catégories :

  • ceux qui ne font aucune mention du français dans leur programme.
  • ceux qui assurent le "minimum syndical" dont ont on voit bien qu'il s'agit pour eux de ne pas oublier un thème (comme ils ne souhaitent pas oublier une catégorie de français), mais dont ce n'est visiblement pas une préoccupation majeure.
  • ceux qui affirment quelques exigences
  • enfin un véritable programme de réaffirmation de la langue française.

(nous surlignons en jaune quelques points nous paraissant particulièrement intéressants, en violet pour les points critiqués par nous) Poutou - Arthaud - Macron - Fillon - Hamon - Lassalle - Cheminade - Mélenchon - Le Pen - Asselineau - Dupont-Aignan


1) Aucune mention du français dans leur programme

Pas plus Philippe Poutou dans "Nos vies, pas leurs profits !" que Nathalie
Arthaud
dans "Faire entendre le camp des
travailleurs
" ne font une quelconque mention de la langue
dans leurs programmes semblant oublier que la domination linguistique
pèse en premier sur les milieux les plus modestes et s'ajoute à toutes
les autres types de domination.


2) Le "minimum syndical"

Emmanuel Macron qui
s'est exprimé en anglais à Berlin, énonce quelques belles phrases qui n'engagent à rien
pour satisfaire tout le monde : "Nous avons tous en partage notre langue,
notre premier trésor commun, à la fois notre socle et notre phare : ce qui
nous a fait et ce qui nous distingue, nourri aussi par la vitalité de nombreuses
et belles langues régionales.
"

Il se sert (comme d'autres) de la langue française comme outil de contrôle de la laïcité et de l'immigration : "Nous organiserons pour les ministres du culte une formation universitaire à la laïcité, aux valeurs de la République et à la langue française."

Et aussi "Nous ferons de la maîtrise de la langue française le principal critère de l’obtention de la nationalité française. Nous renforcerons l’apprentissage de notre langue pour les candidats à la naturalisation. Quelle meilleure preuve de la volonté de quelqu’un de s’intégrer et de devenir français ?" [Pourquoi pas ?]

Mais aucune mention des menaces qui pèsent sur notre langue, malgré de belles phrases comme "Notre culture, et la langue française qui en est la matrice, sont une source de rayonnement international". En revanche il soutient le retour du latin et grec, ce que nous ne pouvons qu'applaudir, mais hélas aussi, celui des "parcours européens" (soit pour résumer les cours d'histoire ou de maths en anglais…)


François Fillon semble ne se préoccuper de la langue française
qu'au niveau international dans une phrase plutôt
confuse issue d'un paragraphe "Une justice simple et efficace
pour redonner confiance aux professionnels du droit et aux justiciables
" dont
on ne voit guère
le rapport avec la question : "Réaffirmer
la langue française au sein des institutions européennes et des organisations
internationales
en tant que vecteur du Droit et des valeurs de
la francophonie notamment à partir des Outre-mer qui rayonnent sur une
importante population francophone et sur des pays émergents.
"

Pour lui la langue française semble se limiter à la francophonie "La France porte une voix singulière dans le monde. Par son histoire, sa culture, sa langue, elle a su souvent parler à l’ensemble de l’humanité Je soutiendrai et développerai la francophonie en m’appuyant sur l’inestimable atout que représente le partage de la langue française par près de 300 millions de locuteurs à travers le monde. Dans cet esprit, je veillerai à ce que les 2,5 millions de Français résidant hors du territoire national soient des relais et des vecteurs d’influence."

En France même, la langue française ne semble être pour lui qu'un outil de lutte contre l'immigration "Réduire l’immigration légale au strict minimum (tenant compte notamment des ressources, du logement, de la couverture sociale, de la maîtrise de la langue française."

En revanche il lui semble normal de "Revaloriser les traitements des enseignants, en développant une part "mérite" dans la rémunération, et accroître les possibilités de promotion accélérée pour les professeurs enseignant leur discipline en langue étrangère" (sic !)


Benoît Hamon n'a pas apparemment de programme réuni dans un document
unique il faut donc se repérer dans un site Internet très fouillis. Il réaffirme
lui aussi de grands principes : "Affirmons la force de la France,
de son histoire et de sa géographie, de ses valeurs, de sa langue
et
de sa culture, […]
"

Il parle surtout de francophonie "Je veux PROMOUVOIR LE FRANÇAIS comme langue en partage dans le monde, selon une démarche ouverte, et proposerai la création d’un "Palais de la langue française".

Et aussi "Parce que partager une même langue dans le monde d’aujourd’hui est un atout exceptionnel, culturel, scientifique et économique, je DÉFENDRAI LA FRANCOPHONIE.

Pour cultiver le sentiment d’appartenance à la francophonie, je proposerai un visa francophone pour les étudiants, les chercheurs, les chefs d’entreprise et les artistes." Mais par ailleurs il fragiliserait un peu plus le français en France-même avec son "Je ferai ratifier par la France la CHARTE DES LANGUES RÉGIONALES ou minoritaires".


Jean Lassalle n'évoque
la langue que dans le cadre des "relations avec le Sud et l’Afrique" : "Notre
langue, partagée avec les
pays
francophones, entretient un cousinage culturel précieux
. Nous devons
demain redevenir des partenaires et des alliés, dans un même dessein enfin
apaisé.
"


Jacques Cheminade se
limite à demander d' "Arrêter
la politique de fermeture des activités des Instituts et des
Alliances
français dans le monde
" [accord
douteux
], ce que nous approuvons, bien entendu !


3) Quelques exigences

Jean-Luc Mélenchon semble lui aussi se limiter à la francophonie.
Sujet regroupé au
point 64 de "L’Avenir en commun" dans le chapitre Passer à la
francophonie politique
: "La langue française est la troisième
langue la plus parlée au monde. Mais si peu est fait pour la mettre en
valeur, la diffuser, multiplier ses usages et les liens entre ceux qui
l'ont en usage commun. C'est un trésor à faire vivre pour un monde meilleur
et davantage de mises en commun.
"
Sont ainsi proposées les mesures suivantes :

  • "Réorganiser les institutions de la francophonie en agissant pour son recentrage sur la défense, le rayonnement de la langue et son usage commun
  • Créer une académie et un Erasmus de la francophonie
  • Renforcer le réseau des Instituts/Alliances françaises dans les pays non francophones et planifier les échanges d'étudiants et de lycéens
  • Renforcer la présence des auteurs francophones ultra-marins et étrangers dans les programmes scolaires
  • Élaborer des contenus éducatifs et des diplômes communs entre pays francophones
  • Développer au moins une revue scientifique internationale digne de ce nom en français
  • Défendre l'usage du français dans les institutions internationales à commencer par l'Union Européenne
  • Renforcer les médias audiovisuels francophones (RFI, France 24 et TV5 Monde) et les mettre en partage avec la communauté francophone".

Marine Le Pen parle
brièvement de la langue française en prenant 2 engagements sur les "144
engagements présidentiels"
."Défendre la
langue française
. Abroger
notamment les dispositions de la loi Fioraso qui permettent de restreindre
l’enseignement en français dans les universités
" (engagement 96).
Ce à quoi
nous ne pouvons que souscrire.

Et une déclaration d'intention un peu vague : "Renforcer les liens entre les peuples qui ont le français en partage" (engagement 123).


François Asselineau propose un certain nombre de mesures mais qui
ne concerne que la Francophonie mais pas le français en France.

L'essentiel se trouve dans le chapitre Francophonie - Redonner toute la priorité à nos liens avec le monde francophone : "L’UPR veut rétablir la solidarité́ "francophone" et salue l’action d’Abdou Diouf à la présidence de la francophonie. [...] La croissance démographique de l’Afrique francophone permet d’envisager en 2050, 750 millions locuteurs français. Ce constat prometteur devrait inciter les dirigeants français à redonner la priorité aux liens avec les pays de la francophonie, mais ils s’acharnent à affaiblir toute coopération avec eux en cloisonnant la France dans le périmètre étroit et arbitraire de l’Union européenne. Le désintérêt des dirigeants pour la Francophonie est en parfait accord avec la construction européenne qui postule des distinguos entre pays recommandables et les autres. [...] L’UPR veut donner corps à une véritable communauté francophone fondée sur des liens d’égaux à égaux et entretenir un lien politique permanent entre les États de la Francophonie. L’UPR fait de la Francophonie, dans son programme politique, un concept majeur où la coopération politique, économique, sociale et culturelle y tient une place éminente."

Dans ce cadre il propose les mesures suivantes :

  • 165. Créer un parlement de la francophonie qui sera installé dans les anciens locaux de l’UNESCO à Paris. Donner corps à une véritable communauté francophone en entretenant un lien politique permanent entre les États de la francophonie. Renforcer la diplomatie entre pays francophones et favoriser l’adoption de positions communes dans les grandes institutions internationales (ONU, FMI, OMC, etc.)
  • 166. Réorienter une partie des fonds structurels, actuellement versés à l’UE, vers les États de la francophonie
  • 167. Développer un système d’échanges de type Erasmus avec les pays de la francophonie
  • 168. Sensibiliser le peuple français à son appartenance à cette sphère ayant le français en partage

On trouve également dans un paragraphe intitulé Moralisation de la vie politique l'engagement suivant : "Le chef de l’État prendra toutes ses vacances en France et demandera à tous les ministres d’en faire autant. Il s’exprimera systématiquement en langue française dans toutes les rencontres internationales et demandera aux ministres d’en faire autant."


4) Un véritable programme de réaffirmation de la langue française

Nicolas Dupont-Aignan propose
sans doute le projet le plus développé concernant la langue française. Bizarrement
les engagements sont regroupés
dans le chapitre Affaires étrangères : une certaine idée de la
France
: Il s'agit ainsi de rebâtir une diplomatie nationale
digne de ce nom, déclinée dans les différentes régions du monde et adossée
au rayonnement de notre langue comme à la présence à l'étranger d'une communauté française
qui mérite d'être mieux soutenue.
Les
mesures sont regroupées dans la partie Soutenir et développer à grande échelle
la francophonie, levier de l’influence française.
Cette
partie se décompose en 3 sous-parties : Pour le français en France, Pour
l’action culturelle française hors de France
et Pour
la Francophonie institutionnelle mondiale
.

Pour le français en France regroupe 9 engagements :

  • "20. Remettre à sa due place, première et prioritaire, la langue française dans les écoles maternelles, primaires, secondaires et professionnelles, en accroissant sensiblement les horaires d’étude, les niveaux de formation des maîtres et d’exigence de qualité, l’efficacité de méthodes éprouvées d’apprentissage.
  • 21. Imposer une part importante en français dans toutes les formations diplômantes des universités et grandes écoles françaises.
  • 22. Proposer une loi renforcée de protection du français (sur le modèle de l'ancienne loi Toubon), et la faire appliquer en instituant un véritable "droit au français", notamment dans les entreprises.
  • 23. Accroître sensiblement les aides publiques aux institutions officielles et associations chargées de développer les productions terminologiques et les traductions.
  • 24. Promouvoir la communication scientifique en français : ne subventionner aucun colloque se tenant en France qui exclurait le français.
  • 25. Veiller au rétablissement de la diversité réelle des langues étrangères enseignées et offertes dans le concours d’accès à la fonction et aux services publics.
  • 26. Enjoindre aux administrations publiques de ne pas traiter les documents de travail reçus uniquement en langue étrangère, et de ne répondre qu’en français.
  • 27. Exiger des organismes publics de contrôle des médias et de la publicité un respect strict et assorti de sanctions réelles, de la Constitution et des lois et règlements pertinents.
  • 28. Imposer un niveau suffisant, officiellement attesté (à l’identique du TOEFL américain) de connaissance du français à l’entrée des candidats étrangers à l’immigration légale et au regroupement familial. Créer un grand média de la francophonie qui ferait résonner la culture française sur les satellites du monde entier. Créer de grandes universités francophones d'excellence à l'étranger, en relation avec nos centres de recherches (Pasteur, IRD, CIRAD...)."

Pour l’action culturelle française hors de France regroupe 7 engagements :

  • "Rétablir, puis accroître sensiblement le niveau de financement de cette action culturelle (écoles et lycées ; filières universitaires ; instituts et centres de langue et de culture, de recherche et de soins, Alliances françaises et importantes O.N.G aux buts analogues.
  • Augmenter sensiblement l’aide française au développement, et la concentrer bien davantage sur les pays francophones et francisant, notamment d’Afrique.
  • Créer une académie destinée aux jeunes français issus de l’immigration et aux étrangers passés par nos écoles à l’étranger pour en faire les ambassadeurs de notre pays dans leur pays d’origine dans les secteurs économiques et culturels.
  • Soutenir la diffusion des produits culturels français à l’étranger.
  • Créer un grand média de la francophonie qui ferait résonner la culture française sur les satellites du monde entier.
  • Créer de grandes universités francophones d'excellence à l'étranger, en relation avec nos centres de recherches (Pasteur, IRD, CIRAD...).
  • Soutenir l’exception culturelle française."

Et enfin Pour la Francophonie institutionnelle mondiale regroupe 5 engagements :

  • "Faire respecter le statut du français langue officielle et de travail dans diverses institutions internationales, européennes au premier chef.
  • Contester en Conseil européen le statut de l’anglais langue officielle des institutions de l’Union Européenne, afin de tirer – aussi dans ce domaine toutes les conséquences du Brexit.
  • Engager, avec nos partenaires dans l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), une négociation d’ensemble pour en faire, dans une relation de respect mutuel, une Communauté de solidarité réelle à la fois linguistique et de développement concerté, notamment en la rapprochant de la valorisation enfin accrue tant de nos départements et territoires d’outre-mer que de notre vaste espace maritime, le deuxième du monde.
  • Renforcer les coopérations entre pays francophones dans les secteurs de demain : éducation supérieure, nouvelles technologies, notamment le numérique, transition énergétique.
  • Créer une plate-forme Internet de référence chargée de la promotion du tourisme en pays francophone."
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