Histoire de la langue française – 5 XVIIe siècle

5) XVIIe siècle

Histoire langue française XVIIe siècle
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La monarchie absolue

Jean Nicot

Jean Nicot

Ce siècle est marqué par le triomphe de la monarchie absolue et le long règne de Louis XIV (1643-1715). L’Alsace, le Roussillon, l’Artois et la Flandre sont réunis à la France, l’assimilation linguistique y est à peine entamée. À l’exception de l’administration, la langue n’est pas considérée comme affaire d’État. Strasbourg française en 1681, par exemple, est dispensée de l’ordonnance de Villers-Cotterêts.

Néanmoins, le français se répand. Le Sud continue à parler l’occitan sous ses multiples formes, Racine, par exemple, note son impossibilité à communiquer en français au sud de Lyon. Les campagnes continue à parler patois mais le français se répand dans les grandes villes.

Le français se répand également à l’étranger, paradoxalement, du fait de la révocation de l’édit de Nantes en 1685 qui va amener plusieurs centaines de milliers de protestants à s’exiler. Un collège français est fondé à Berlin en 1689, la Hollande publie de nombreux livres en français.
Le français continue à gagner du terrain sur le latin dans l’enseignement et les sciences, Les thèses peuvent être soutenues en français à partir de 1624. Descartes publie le premier traité de philosophie en français le Discours de la méthode en 1637. Ménage donne le premier recueil étymologique scientifique en français en 1650.

Le 13 mars 1634 a lieu la première réunion d’une compagnie de vingt-sept membres, elle se donne huit jours plus tard le nom d’Académie Française. En 1635, l’institution est consacrée par lettres patentes du roi, elle est chargée de faire des livres théoriques et de codifier la langue.
La réglementation de la langue est l’œuvre des salons et de la Cour sous la férule de Malherbe, Vaugelas et Bonhours. Malherbe s’est efforcé de choisir entre toutes constructions possibles, les plus claires et les plus fixes quitte à ce qu’elles soient moins pittoresques et moins variées. Il rejette les mots provinciaux ou pédants. Pour Vaugelas qui influence l’Académie, les critères du "bon usage" sont "la façon de parler de la plus saine partie de la cour", soit l’élégance et la justesse de l’expression.

Les dictionnaires commencent à se répandre, le Thrésor de la langue françoise de Jean Nicot est publié en 1606, celui de Furetière parait en 1690 et contient les mots populaires, anciens ou techniques. Le dictionnaire de l’Académie Française parait en 1694, il donnera désormais la graphie des mots, il exclura une grande partie du vocabulaire jugé vieilli (angoisse, immense...) ou populaire (poitrine, épingle...). En 1660 parait la grammaire générale de Port-Royal dont l’influence est considérable.

C’est également la grande époque du théâtre classique avec Corneille, Racine, Molière...

La langue

C’est la période du français dit classique. Les dernières diphtongues disparaissent, les consonnes finales continuent à tomber (on dit couri, mouchoi), le peuple de Paris prononce lui ces R finaux. A la Cour, i faut est la bonne prononciation, il faut passant pour pédant et provincial. Le E neutre en fin de mot disparaît, dire est prononcé dir et non plus di-re, seul le Midi va continuer à prononcer le E final.

Ainsi les mots sont désormais tous accentués sur la dernière syllabe non-muette. Beaucoup de E à l’intérieur des mots deviennent muets également. Certains é sont plus longs que de nos jours : dans aimée et aimer par exemple, par opposition à aimé. Corneille prononçait dzir, dzèr pour désir et désert et prémier et ensévelir à l’opposé de ce qui se fait de nos jours. Dans la langue populaire, le son oué devient progressivement oua dansles mots comme roi. Cette prononciation est considérée comme très vulgaire. La langue distinguée s’y ralliera plus tard.

En revanche, les milieux de la Cour ont commencé au 16ème siècle à prononcer les finales d’imparfait et de conditionnel écrites encore OI, È au lieu de OUÈ avant, cette prononciation est générale au 17ème. De ce fait certains mots vont rester en OI (croire, suédois...) d’autres passant en AI (faible, anglais...) un doublet comme raide/roide montre l’incertitude de cette époque. La graphie OI ne sera généralisée qu’en 1835. Le L "mouillé" recule devant le son Y : Caillou prononcé calyou tend à se prononcer cayou comme aujourd’hui, le R roulé recule face au R "grasseyé".

Le sujet placé devant le verbe se généralise (par opposition à des formes comme je soussigné déclare...). Les règles concernant l’accord du participe passé sont définies à cette époque. Le passé composé commence à prendre le sens du passé simple qui commence à se restreindre. En 1679 les participes présents deviennent invariables (on ne dira plus les filles jouantes mais les filles jouant).

L’orthographe

Les diphtongues ont quasiment disparues sauf AU, EAU. Les consonnes finales ne prononcent plus sauf L, R et S. Beaucoup de graphies différentes cohabitent parfois dans un même texte. Le dictionnaire de Jean Nicot (1606) marque l’apparition des dictionnaires modernes. Celui de Richelet (1680) supprime les lettres non prononcées (avocat, trésor et dificile pour advocat, thrésor et difficile). L’adaptation de l’écriture à la prononciation rencontre des résistances. En 1679, les participes présents deviennent invariables (on ne dit plus les filles jouantes mais jouant).

Aux écrivains et aux imprimeurs s’oppose l’Académie Française, celle-ci dans la première édition de son dictionnaire (1694) déclarant "qu’elle désire suivre l’ancienne orthographe qui distingue les gents de lettres davec les ignorants et les simples femmes.". A partir de cette date, l’Académie va donner la norme orthographique, aux autres dictionnaires, aux correcteurs et finalement aux individus.

Néanmoins cette édition marque des évolutions significatives : les lettres J et V sont introduites permettant de supprimer des consonnes inutiles. Des consonnes étymologiques finales sont supprimées (nud devient nu, bled blé, cuict cuit...), en revanche, l’Académie n’adopte pas l’accent intérieur gardant partout des S muets (elle change néanmoins cousture en couture). Elle enlève des G finaux (ung devient un, maling malin...), des Y en début de mots sont remplacés par des I (yvoire devient ivoire, yvre ivre...), des hiatus sont supprimés (aage devient âge, rheume rhume) enfin beaucoup de EN sont remplacés par AN (dedens devient dedans, embassade ambassade)

Le vocabulaire

Les grammairiens et les lettrés s’emploient à épurer le vocabulaire ce qui se produit dans la littérature. Ils font la chasse aux termes grossiers et crus, les néologismes sont découragés.

Les besoins du domaine des sciences et des techniques amène pourtant la création de termes issus le plus souvent du grec. Quelques apports espagnols et allemands complètent les nouveautés de la période.

Marc-Antoine Renard

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