Deux livres à lire (suite)
langue française histoire culture
- Gérard Cartiert "Du Franglais au Volapük ou Le Perroquet aztèque" [ Obsidiane - Les Placets invectifs, 2020)
- Alain Borer " De quel amour blessée"(Gallimard, 2015)
Cheminant Du franglais au Volapük, Gérard Cartier, ingénieur, poète et essayiste, en arrive au Perroquet aztèquequi, au bout de sa lignée d’ancêtres, reste, selon Hergé, le seul être vivant capable de faire entendre les imprécations du chevalier de Hadoque du temps de Louis XIV. Destin de tout le français dans un siècle ou deux ?
L’écrivain rimbaldien Alain Borer, que notre auteur cite très volontiers, se pose, en termes raciniens, la même question de la pérennité du français, dans le titre et le corps de son remarquable ouvrage de 1974 (Gallimard) : ("Ariane, ma sœur, ) De quel amour blessée(vous mourûtes au bord où vous fûtes laissée "). Lamentation familière des romantiques et de Hubert Robert sur les ruines de Rome, sur les civilisations hélas mortelles, jusqu’aux plus brillantes, telle la française ? "Ruines de Babel" ?
Ces deux livres de même inspiration, riches d’enseignements sur la nature, les ressorts profonds et les évolutions de notre langue, donnant - accessoirement mais utilement - les équivalents français de moult anglicismes, dénoncent certes, comme d’autres avant eux, la volonté de nos amis-ennemis anglo-saxons, de substituer l’anglo-américain, un globish, à d’autres langues, y compris aux grandes de civilisation, dont la nôtre. "Gavage à l’anglais", "grand décervelage" par étouffement des autres pensées, écocrime de civilisation. Ils dénoncent surtout le renoncement, le désamour, parfois la honte, le simple "délaissement" par snobisme, fatigue séculaire, menant à la "servitude volontaire", de trop de nos élites, media, milieux divers.
Mais l’intérêt éminent de ces livres est aussi dans l’émergence d’un mouvement nouveau, jalonné par d’autres parutions récentes, de Résistance active qui nourrit l’espoir d’un sursaut salvateur, d’un possible retournement. Leurs auteurs sont d’ailleurs, comme d’autres, tous deux membres du Haut Conseil de la langue française et de la Francophonie (HCLFF) qui vise à porter à un niveau très supérieur l’action des associations en synergie qui ont porté sa création.
Ainsi, Gérard Cartier va jusqu’à appeler de ses vœux la formation de groupes de jeunes, résistant à la manière de leur âge, voire d’un "Front de Libération". Espoir ? Albert Salon.