La France, prise en otage par les ennemis du monde francophone

La France, prise en otage par les ennemis du monde francophone

par Ilyes Zouari

La censure totale, à la nord-coréenne, des derniers Jeux de la francophonie, organisés l’année dernière à Kinshasa, plus grande ville francophone du monde, a été une énième illustration de la politique de marginalisation de la francophonie menée par les plus hautes autorités politiques françaises. Contraste saisissant avec la couverture médiatique dont bénéficient les Jeux du Commonwealth outre-manche.

Un mois plus tôt, en juin 2023, l’exclusion de la langue française lors du "Concert pour la planète" organisé au cœur même de Paris, et de surcroît ou pied de la Tour Eiffel, et la traduction uniquement en langue anglaise du discours tenu en portugais du président brésilien Lula, face aux 20 000 spectateurs présents, fut également un autre exemple ahurissant de cette politique hostile à l’égard de la langue française et du monde francophone.

Ces deux cas concrets d’éradication de la langue française et de toute présence médiatique de l’espace francophone, font partie d’une longue liste d’exemples qui se multiplient depuis près de deux décennies. Depuis que la France est passée sous le contrôle de fanatiques européistes et atlantistes, qui s’emploient avec acharnement à mener une politique agressive d’anglicisation, d’élimination de la langue française en France et dans les différentes organisation internationales (dont l’Union européenne), et à couper le peuple français du monde et de la grande famille francophones.

Pour ces ennemis de l’intérieur, plus dangereux encore que les ennemis de l’extérieur, multiséculaires ou plus récents, le peuple français ne doit rien savoir du monde francophone, dont il devrait même ignorer, purement et simplement, l’existence. Et ce, afin de dévaloriser la France aux yeux de la population française, en lui faisant oublier son appartenance à un vaste espace linguistique, dans le but de lui faire accepter le maintien du pays au sein de l’Union européenne et de l’OTAN. Deux ensembles présentés alors comme nécessaires, et même vitaux, pour une pauvre France qui ne pourrait rien faire "seule".

Volontairement maintenu dans l’ignorance, la population française n’a donc rien su des jeux de la francophonie de Kinshasa, tout comme il n’avait rien su de ceux de Nice, organisés en 2013 en France même, mais totalement censurés par la presse nationale, sur ordre du pouvoir européiste et atlantiste. Ce même pouvoir, qui, et comme chacun d’entre nous peut le constater, interdit également toute publication dans la presse d’article prônant la sortie de l’Union européenne, et interdit d’antenne toute personne défendant cette idée.

Aujourd’hui, la jeune génération de Français, y compris chez les catholiques les plus fervents, ignore totalement l’existence de la basilique Notre-Dame de la Paix de Yamoussoukro, en Côte d’Ivoire, plus grand édifice chrétien au monde, et quasi-réplique de la basilique Saint-Pierre de Rome. Aujourd’hui, les relations économiques sont quasi inexistantes entre les deux plus grands pays francophones du monde, la France et la RDC [Congo Kinshasa].

La France n’a représenté en 2022 que 0,5 % du commerce extérieur de ce gigantesque pays, contre 38,5 % pour la Chine (soit environ 77 fois moins !).

Sous la direction de ces fanatiques de l’Europe et de l’Otan, qui ont soigneusement éliminé tous les gaullistes et patriotes "francophones" des hautes sphères de la politique de la fonction publique, la France et son peuple doivent subir une politique particulièrement hostile à ses propos intérêts économiques et géopolitiques : hostile à travers une politique d’anglicisation à outrance (sans équivalent chez les autres grandes puissances, comme la Chine, le Japon ou la Russie) ; hostile à travers une politique d’aide au développement bénéficiant désormais essentiellement pays d’Europe de l’Est, pourtant eux-mêmes généralement hostiles aux intérêts de la France et de son peuple, au profit des seuls intérêts économiques de l’Allemagne et des intérêts militaires et géopolitiques des États-Unis.

Il n’est pas normal que huit des dix premiers pays bénéficiaires les aides françaises au développement soit des pays d’Europe de l’Est membres de l’Union européenne. Il n’est pas normal que l’Estonie, petit pays d’un million d’habitants, reçoive presque autant d’aide que la RDC et ses plus de 100 millions d’habitants (187 millions d’euros en 2022, contre 174). Il n’est pas normal, qu’à population quasi égale, la Pologne reçoive chaque année plus de 2 milliards d’euros d’aide publique française, contre environ 400 millions pour le Maroc, grand ami et allié de la France, contrairement à la Pologne… Une politique que l’on pourrait résumer par la célèbre expression " travailler pour le roi de Prusse ", qui semble être désormais la doctrine de la politique étrangère de la France...

Pourtant, la France est une grande puissance mondiale, la deuxième ou troisième en tenant compte de tous les critères de puissance (économie, capacités militaires, technologie, industrie spatiale, influences diplomatique et culturelle, territoire maritime…). De plus, la France a la chance de faire partie d’une grande famille francophone, qui rassemble désormais 583 millions de frères et sœurs, répartis sur un territoire vaste comme près de quatre fois l’Union européenne tout entière.

Un vaste ensemble, qui est, par ailleurs, l’espace linguistique le plus dynamique au monde, et qui a dépassé l’espace hispanophone, en 2011, et plus récemment l’Union européenne dans ces anciennes frontières, Royaume-Uni inclus. Un vaste espace dont l’émergence démographique s’accompagne d’une émergence économique, et notamment en Afrique francophone, qui constitue le moteur de la croissance africaine (ayant réalisé en 2023 le niveau de croissance économique le plus élevé du contient pour la dixième année consécutive et la onzième fois en douze ans), en plus d’être globalement et historiquement la partie du continent la moins touchée par l’inflation, la moins endettée, mais aussi la moins frappée par les inégalités, la corruption, la violence et les conflits. Une réalité qui ne peut surprendre que les personnes aux connaissances fort limitées du continent, qu’ils soient hauts fonctionnaires, universitaires ou journalistes.

Ce vaste espace, auxquels s’ajoutent plus de 350 millions de personnes à travers le monde ayant une certaine connaissance de la langue française, à différents degrés (le français étant la deuxième langue la plus enseignée au monde), offre donc d’énormes opportunités économiques à tous les pays et peuples en faisant partie. Mais la langue française, c’est également une certaine conception des relations humaines et un certain nombre de valeurs, qui la distinguent notamment de la langue anglaise, et auxquelles le monde francophone sert de tremplin. Ainsi, le français est globalement synonyme de recul des inégalités sociales, de la violence, de la criminalité, des extrémismes religieux et des communautarismes, ainsi que d'un plus grand respect de la diversité des opinions.

À titre d’exemple, seuls deux pays francophones font partie des vingt pays les plus inégalitaires au monde (le premier pays francophone n'arrivant d'ailleurs qu'en douzième position), contre huit pays anglophones, ou encore six pays hispanophones. De même, il est intéressant de noter que les premiers pays au monde à avoir interdit totalement ou partiellement le port du voile intégral, ou niqab, étaient des pays et territoires francophones d’Europe, d’Afrique et d’Amérique du Nord, suivis ensuite par d’autres pays à travers le monde, auxquels ils avaient ainsi ouvert la voie… à l'exception notable des pays anglophones, demeurés totalement hermétiques et contribuant ainsi à normaliser et à favoriser l'expansion de cette pratique étrangère à l'islam, et nuisant considérablement à l'image et aux intérêts de tous les musulmans à travers le monde.

Il est donc temps pour la France de changer d’attitude à l’égard de sa langue du monde francophone. Et ce, dans un contexte international marqué par la montée en puissance démographique et économique de l’espace francophone, et par un vaste mouvement international de désanglicisation, mené parallèlement à une politique de dédollarisation, notamment par des puissances émergentes soucieuses de défendre au mieux leurs intérêts économiques et géopolitiques. Ainsi, les mesures d’effacement, de suppression, de la langue anglaise, se multiplient. Comme en Chine, où les écoles et universités suppriment, les unes après les autres, les tests et examens d’anglais, et comme en Russie, où l’anglais est désormais interdit dans les nouvelles stations de métro de Moscou.

Une tendance mondiale que l’on observe également dans des pays ou territoires occidentaux, comme au Québec (avec la récente loi 96), ou encore comme aux très anglophiles Pays-Bas, où 14 universités ont décidé, en février dernier, de supprimer totalement ou partiellement les cours en langue anglaise (après en avoir constaté la totale inutilité économique pour le pays). Plus que jamais, la France doit donc imposer le respect de la primauté de la langue française sur son propre territoire, imposer le respect du statut officiel de la langue française dans les différentes instances et organisations internationales concernées, et redonner la priorité à l’espace francophone dans sa politique d’aide au développement.

Mais il est également temps pour les francophones du reste du monde de changer d’attitude à l’égard de leurs confrères français. Les francophones d’Amérique du Nord et des pays du Sud ne doivent plus avoir le moindre complexe d’infériorité dans leurs relations avec les acteurs économiques, politiques et culturels français, faisant preuve d’indifférence, ou de mépris, à l’égard de la francophonie mondiale. Ils ne doivent plus accepter de cartes de visite en anglais, ne plus répondre à des courriels envoyés avec une signature en anglais (et encore moins avec un texte en langue étrangère), et ne plus participer à des événements organisés en France, mais avec une dénomination en langue anglaise (comme l’Africa day, organisé cette semaine à Sciences Po, en étroite collaboration avec la "French-African foundation"). Ils ne doivent plus accepter la moindre correspondance en langue anglaise avec des organismes français, ou rattachés à l’Union européenne. Ils doivent s’assurer du respect du statut officiel du français au sein de l’Union africaine. Enfin, ils ne doivent plus craindre de faire pression sur les médias français, destinés à la population française (à ne pas confondre avec les médias français destiné au reste du monde), afin qu’ils accordent à l’actualité francophone la place qu’elle mérite et qu’elle n’aurait jamais dû perdre.

L’heure est à la fermeté face à toutes les parties cherchant à nuire à la francophonie, à l’affaiblir, à en réduire la taille et la dimension mondiale, au mépris des intérêts de tous les peuples francophones du monde.