Lettre au Président du CSA sur le matraquage anglomane dans les médias (12 novembre 2012)
CSA médias anglomanie protestation langue française
AFRAV, Association Francophonie Avenir président : Régis Ravat, syndicaliste
ALF, Avenir de la Langue Française et FFI-France président : Albert Salon, ancien ambassadeur, docteur d’État ès Lettres,
COURRIEL (Collectif Unitaire Républicain pour la Résistance, l’Initiative et l’Émancipation Linguistique) président : Georges Gastaud, philosophe
Droit de Comprendre - président : Marc Favre d’Échallens
Le 12 novembre 2012
Objet : demande formelle de droit de réponse à propos du bilinguisme en France
Monsieur le Président du C.S.A.,
A plusieurs reprises nos associations vous ont alerté, ensemble ou parallèlement, à propos des pratiques linguistiques désastreuses qui affectent l'audiovisuel public et privé au détriment du français, langue officielle de notre pays, et à l'avantage du "globish". Nous ne constatons pas, hélas, d'évolution positive à cet égard alors qu'il s'agit tout bonnement de faire respecter l'article II de la Constitution ainsi que les prescriptions de la loi Toubon.
Il y a pire désormais. De manière répétée, France 2 se fait le chantre de l'anglophonisation massive de notre pays sans jamais donner la parole aux défenseurs de notre langue. Tantôt il s'agit de vanter l'anglais dès l'école maternelle - voire dès la naissance - tantôt, comme ce fut le cas au journal télévisé de 20h du 7 novembre dernier, il s'agit de montrer que la France étant mal placée pour la connaissance de l'anglais, il faut adopter de nouvelles méthodes pour avancer dans la maîtrise de cette langue : et France 2 de donner la parole à la directrice de Sciences Po qui dispense ses enseignements en anglais aux futurs élus, hauts fonctionnaires et hommes politiques de la nation, en violation ouverte de la loi Toubon qui fait du français la langue de l'enseignement, mais aussi en contradiction avec le discours que M. François Hollande a prononcé le 27 août 2012 à Paris intitulé La francophonie au cœur de la XX° conférence des Ambassadeurs et au cours duquel il demande à ceux-ci de "ne jamais oublier que la promotion de la langue, de la création française, c’est l’affirmation d’une vision du monde qui fait place à toutes les cultures".
Et cette personne si peu soucieuse du respect dû à la loi et à l'identifiant majeur de notre nation, d'expliquer qu'en étudiant en anglais, nos futurs hommes politiques s'ouvrent à d'autres modes de pensée, en clair au mode de pensée anglo-saxon avec toutes ses déterminations fort loin d'être neutres idéologiquement, politiquement et économiquement. En clair, il s'agit là d'un formatage redoutable et le prétexte de l'ouverture et du pluralisme de pensée est totalement inconsistant : se demande-t-on si des cours de politique sont délivrés en allemand ou en espagnol en Angleterre, se demande-t-on si l'"ouverture", toujours dans la même direction, ne consisterait pas à délivrer des cours à Sciences Po en chinois, en russe, en arabe ou en castillan ?
Le plus grave c'est que dans cette émission, comme dans les précédentes sur le même sujet - qu'il s'agisse de l'invasion des mots anglais dans le dictionnaire Larousse ou de l'anglophonisation précoce des enfants - le journaliste de service ne s'interroge JAMAIS sur les dangers qui pèsent sur la langue nationale, sur la signification politique de cette politique de substitution linguistique qui touche de plus en plus de domaines : enseignes, publicités (les publicités de l'audiovisuel sont MASSIVEMENT envahies par le franglais et par les chansons en anglais comme bruit de fond), commerce, travail des entreprises françaises en France même, recherche, chanson, titre des films "français", etc., sans que les autorités esquissent le moindre geste pour faire respecter la loi, c'est-à-dire l'État de droit.
C'est pourquoi nous demandons que dans les mêmes conditions que celles qui ont prévalu le 7 novembre, un droit de réponse sur la langue française soit accordé rapidement à nos associations. Notre pays est à terme menacé de voir sa langue reléguée au second plan sans que jamais les citoyens n'aient pu débattre contradictoirement de la politique linguistique de leur pays. Or le rôle principal d'un service public d'information, financé par tous les Français dont une écrasante majorité tient à sa langue, est de susciter le débat citoyen et non de formater les auditeurs dans le sens de la langue unique et de la pensée unique, fussent-elles bien en cour dans les milieux journalistiques dominants.
Il y aurait beaucoup à dire également sur le comportement de France-Inter dont plusieurs émissions s'intitulent, en pleine illégalité, "come on !", "Summertime" ou "Down town". Si bien que de notre point de vue, une rencontre entre nos associations et M. le président du CSA s'impose au plus tôt.
Cette interpellation concernant les plus hautes autorités de notre pays, nous adressons copie de ce courrier non seulement au médiateur de l'audiovisuel mais au Président de la République et à Mme la ministre de la culture et de la communication.
Certains, M. le Président, que vous donnerez une suite rapide, active et efficace à nos demandes de simple équité, nous vous assurons de nos sentiments sincèrement républicains.
Régis Ravat président de l'AFRAV
Albert Salon président d'Avenir de la Langue Française
Georges Gastaud président du Collectif Unitaire Républicain pour la Résistance, l’Initiative et l’Émancipation Linguistique (COURRIEL)
Marc Favre d’Échallens président du Droit de Comprendre
Annexe : observations et réflexions d’un observateur averti.
Pour prendre un exemple frappant de l’existence de cette organisation du crime linguistique, il n’y a qu’à regarder les actualités de 20 heures, sur France 2. On constate alors aisément, qu’il ne se passe pas une semaine sans qu’il soit diffusé un reportage sur les bienfaits de l’enseignement de l’anglais précoce, sans qu’il soit dit que les Français sont nuls en langues étrangères (sous-entendu, en anglais), sans qu’il soit ressassé que les touristes sont mal accueillis en France parce que les Français ne parlent pas anglais, sans qu’il soit fait une "pub" du dernier film états-unien sorti, de la dernière chanson en vogue aux États-Unis ou du prochain concert à Paris d’une vedette anglophone.
Il est facile de constater aussi que lorsqu'un journaliste de France 2 interroge un étranger pour les besoins d'un reportage, dans la plupart des cas, nous avons droit alors à un témoin qui parle en anglais. Le samedi 9 juin, nous eûmes même la désagréable surprise d'entendre un chef de la police de Montréal, au nom très français, parler en anglais.
Si entre le 2 et le 6 juillet 2012 a bien eu lieu le premier Forum mondial de la langue française à Québec, pourtant, force est de constater, que durant cette période, aucun reportage, aucun commentaire n'a été accordé à cet événement majeur pour notre langue, sur France 2, aux journaux de 20 heures.
Comment se fait-il que cette chaîne publique, dont une des missions - cela est inscrit dans le cahier des charges de la chaîne -, est de veiller à la promotion, à la diffusion et à la défense de la langue française, fasse ainsi la sourde oreille lorsqu'il s'agit de mettre en avant nos intérêts linguistiques ?
Alors que se déroulait ce Forum mondial, et pour prendre un exemple du haut degré de trahison linguistique qui règne sur France 2, au journal de 20 heures, le mardi 3 juillet 2012, on nous parla de l'Allemagne qui recrutait des immigrants en anglais, d'Airbus à Toulouse qui présentait ses avions en anglais à des visiteurs. De plus, le 8 juillet, nous eûmes droit à un énième reportage pour apprendre l'anglais en séjour linguistique en Angleterre. Bref, il y aurait un complot sur France 2 contre la langue française et contre la Francophonie au profit de l'anglais-roi que cela ne serait pas étonnant.
Tout concorde donc pour dire que France 2, joue à fond la carte de l'anglais et se moque comme d'une guigne de la promotion de notre langue.
Notre chaîne publique suivrait-elle des consignes : promouvoir l'anglais, faire voir aux téléspectateurs que le monde entier parle anglais (même au Québec) ? France 2 ferait-elle pour l’anglais, ce qu’elle fait pour les minorités dites "visibles" ? En effet, s’il est facile de constater qu’à travers de nombreux reportages, les journalistes du journal de 20 heures de France 2 donnent la parole très fréquemment à des personnes issues des minorités "visibles", comment ne pas se poser la question à savoir s’il n’y aurait pas la même stratégie pour mettre l’anglais en avant.
Si faire de la discrimination positive a été plus ou moins validé par la classe politique en général, est-ce que l'anglicisation, en catimini, l'aurait été également ? Qui aurait décidé alors que, au nom de notre bien-être, de notre intérêt supérieur, de la liberté et de l'équité, il faut bourrer le cerveau des téléspectateurs de la langue de Mickey.
Régis Ravat